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« Bon sang, ça fait bien longtemps que je n’ai pas vu une tempête pareille ! » La voix d’Ambre n’est pas très rassurée, et tandis qu’elle regagne son fauteuil, elle commence à se dire qu’ils ne sont sans doute pas prêts de pouvoir quitter le refuge.

- Ca fait longtemps que vous êtes ici ? demande t’elle à Anna.

- Deux heures, tout au plus… lui répond la jeune fille. Nous sommes arrivés en vue du bâtiment au moment où le vent s’est mis à vraiment souffler. Ce n’était pas du tout prévu, puisque nous en avions encore pour 4 heures de randonnée.

- Pour nous non plus. Et il est heureux que nous ayons su qu’il y avait un refuge ici grâce à notre carte et à notre GPS, sinon nous ne l’aurions jamais trouvé. Le blizzard soufflait déjà copieusement quand nous avons réussi à l’atteindre.

Leurs accompagnants respectifs sont quant à eux occupés à allumer le poêle à bois. Yann, 23 ans, est un solide jeune homme, brun ténébreux, aux yeux noisette. Luc, 24 ans, est son parfait opposé de couleur, puisque bien qu’aussi grand, il est d’une blondeur presque parfaite, aux légers reflets cuivrés, et ses yeux sont verts. Chacun d’eux se prétend spécialiste du poêle à bois, retrouvant des instincts d’hommes des cavernes. Mais ils sont en fait bien plus doués pour envoyer un SMS ou se combattre à Fifa 2006 qu’avec du bois et des allumettes, et leurs essais se révèlent tous infructueux. Jusqu’à ce qu’Anna, excédée de les entendre se chamailler, se lève, et, leur arrachant les allumettes des mains, et confectionnant une boule bien serrée de papier, réussisse à faire prendre le foyer.

- Mouais, c’est facile, on t’avait mâché le travail ! bougonne Yann, vexé de se faire ridiculiser par sa jeune cousine de 17 ans.

- C’est vrai ça, ajoute Luc.

Ambre se met alors à rire :

- Allons Luc, tu n’as jamais été très doué pour ça, en tout cas depuis aussi longtemps que je m’en souvienne ! Et ça commence à faire un sacré bail.

- Vous sortez ensemble depuis longtemps ? lui demande Anna.

- En fait, nous ne sortons pas ensemble du tout, mais nous nous connaissons depuis l’enfance. Nos parents sont amis d’enfance et nous passons nos vacances d’hiver et d’été ensemble depuis notre naissance… Enfin, la mienne de naissance car j’ai 6 ans de moins que Luc.

- Tiens, c’est marrant, nous avons le même écart avec mon cousin Yann. Et vous connaissiez déjà le coin ?

- Oui, nos parents partagent un chalet dans la station depuis longtemps. Mais c’est la première fois que nous nous aventurons aussi loin en randonnée. Et vous ? Je ne vous ai jamais vu en bas…

- En effet, c’est notre premier séjour ici. Mais nous sommes habitués à la randonnée, et l’endroit a une excellente réputation. Enfin, en tout cas par beau temps. Mais là, il est 16h et il fait déjà presque nuit, donc c’est cuit pour redescendre. Nous allons devoir passer la nuit ici.

- Ouaip, ça c’est sûr les filles, ajoute Yann, il est hors de question de ressortir dans cette tempête. Heureusement que ce refuge est bien équipé.

Et en effet, pour un refuge d’altitude, il est drôlement bien fourni. Aussi bien en bois sec pour le poêle qu’en nourriture et boisson. Luc, en fouinant dans un coffre, a même trouvé deux bouteilles de gnôle locale. Et il découvre ensuite un jeu de cartes

- Regardez ce que j’ai trouvé. Au moins, on aura de quoi s’occuper ce soir, faute de télé ou de radio.

- Voilà au moins une bonne nouvelle, répondent les trois autres en chœur.

 

* * *

 

 

Quelques heures plus tard, en regardant par-dessus l’épaule de Yann, Ambre se met à saliver.

- Mmmmh ! Mais tu es un vrai chef !

- C’est pas grand-chose, juste une boite de tomates et un peu d’aromates. Mais ça devrait le faire avec les pâtes. D’ailleurs, si tu veux les goûter pour voir la cuisson…

Ambre prend une fourchette, et après quelques infructueux essais, parvient à attraper un spaghetti, souffle dessus et l’aspire.

- C’est parfait, all dente !

- Bon, eh bien servons alors.

Les deux autres sont déjà attablés, discutant autour de deux verres de gnôle.

- Ca va, je vois que vous ne vous emmerdez pas…

- Hé, c’est que le premier verre. Et vous allez voir, ça attaque sec.

Le plat de pâtes à la tomate est bientôt avalé, et les quatre jeunes gens continuent à faire connaissance, évoquant le lycée pour les unes, la fac pour les autres, les randonnées, le cinéma et autres sujets badins. La première bouteille de gnôle voit son niveau baisser dangereusement.

- Bon, c’est pas le tout, mais on l’attaque ce jeu de cartes ? demande Yann

- A quoi on joue ? A la belotte ? Au 8 américain ? proposent les filles.

Luc proteste.

- Ah non, le jeu à la mode cette année, c’est le poker. On ne voit que ça à la télé. Tout le monde sait jouer ?

- Oui !!!

- Bon, je propose un poker simple, sans cartes découvertes… Vous avez de la monnaie ?

Luc sort 50 Euros de sa poche, et Yann en a à peu près autant. Les filles, n’ayant pas pris de sac à main, n’ont pas un sou sur elles.

- Bon, 100 Euros ça devrait aller, on va répartir ça en 4 parts égales. Et jouer petit, à 10 cents l’entrée.

- D’accord, ça parait OK.